Envisager le pire
La semaine dernière, c'est arrivé.
Je suis allé manger chez une amie, un petit repas sans prétention, des discussions sympathiques et sans pression particulière. Nous avons même parlé de ma laxophobie.
Dans ce genre de "petite" sortie, je me lance toujours des défis. Je suis toujours satisfait de tenir le plus longtemps possible sans aller aux toilettes.
Et là, je n'y étais pas allé de la soirée. Même pas envie.
Je suis remonté dans ma voiture avec un petit mal de ventre. Il était temps de rentrer. J'en avais pour une dizaine de minutes. Et ça n'a pas suffi.
Le mal s'est intensifié, j'ai serré tous mes muscles, respiré profondément. Chaque virage est devenu interminable, chaque feu rouge un supplice. Je comptais les secondes et n'arrivais plus à me distraire.
Et je n'ai pas réussi. Il m'a manqué une minute, une pauvre petite minute. J'avais à peine garé ma voiture que j'ai dû relâcher mes muscles. Il faisait nuit, j'étais en bas de chez moi, il n'y avait personne autour.
C'aurait pu être une catastrophe, une fin du monde, un point d'orgue. J'aurais pu, depuis, m'enfermer chez moi avec la peur que ça n'arrive encore le lendemain. Et le surlendemain. Mais ça a été comme une libération. Comme un signe extérieur pour me faire comprendre que le "pire" est surmontable. Qu'il n'empêche pas de vivre. J'aurai revécu ces signes annonciateurs, je me souviendrai à quoi ils ressemblent. Je prends ça comme un répit inestimable.
Ce qui me rassure? Entendre que ça n'arrive pas qu'aux laxophobes.
Je dois être fou de ne pas être désespéré.